• Photo presse Tom 2

    Photo presse Tom 2

  • photo presse Peytavi 2

    photo presse Peytavi 2

  • Photo presse Isabeau 1

    Photo presse Isabeau 1

  • Photo presse Philong 1

    Photo presse Philong 1

  • C.Griss 3

    C.Griss 3

  • Photo presse Lopparelli 1

    Photo presse Lopparelli 1

  • P.Chancel 5

    P.Chancel 5

  • P2 Ouisse

    P2 Ouisse

  • mouanda les fantomes des corniches 6

    mouanda les fantomes des corniches 6

Des villes et des hommes
Auxerre 2018


La photographie a été l’exacte contemporaine du bouleversement urbain qu’a engendré, au XIXe siècle, la première révolution industrielle. Dès les années qui suivent son invention, en 1839, elle se fait le témoin de cette mutation de la cité, le gardien de sa mémoire, le chroniqueur d’un nouveau mode de vie urbain tel qu’il s’offre au regard du promeneur ou du voyageur. Parce qu’elles sont toutes deux nées dans l’élan de la première modernité, un lien ininterrompu unit la photographie à la ville, comme si cette dernière était son domaine de prédilection, son sujet par excellence.
Mais comment faire le portrait d’une ville ? Tel pourrait être le sous-titre de cette troisième édition auxerroise de Chroniques Nomades. Cette question en entraîne très vite une cascade d’autres : comment qualifier une ville, en définir « l’âme » ? Comment la cerner alors qu’elle constitue un ensemble vivant, c’est-à-dire complexe et mouvant ? Comment rendre visibles les strates qui la constituent et qui se sont accumulées au fil du temps ? Car le paysage urbain, à la différence du paysage naturel, c’est d’abord une histoire d’hommes... et de femmes.
Et la chose semble encore plus difficile lorsqu’il s’agit d’une ville étrangère, avec ses codes, ses non-dits. Prudemment, il faut d’abord faire l’inventaire de ce que l’on voit, de ce dont on est sûr.
C’est ce qu’ont fait, chacun à leur manière, les neuf photographes réunis ici. Ils ont parcouru le monde à la rencontre de l’insaisissable objet et ont tenté de l’investir par les biais les plus divers.
Ainsi pour Laurent Ouisse, à Dehli et à Mumbay, ou Pierryl Peytavi, à New York, la véritable identité surgit à l’improviste, dans les détails. Pour Catherine Griss ou Philippe Chancel qui se sont rendus l’une à Rangun, l’autre à Pyong Yang, la ville-capitale est d’abord la traduction visuelle, dans l’espace public, d’un régime politique et d’une situation sociale. Pour Isabeau de Rouffignac, la cité de Bophal n’a plus pour visages que ceux, innombrables, des victimes qui l’ont rendue tristement célèbre. Quant au Zanzibar que nous révèle Philippe Lopparelli, c’est bien plus une ville rêvée qu’une réalité géographique. Trois photographes sont restés, eux, dans leur espace familier, nous faisant partager leur empathie pour leurs habitants : Tom Arndt pour ceux de Chicago, Sovan Philong pour ses compatriotes khmers des faubourgs de Phnom Penh et de Siem Reap, et Baudouin Mouanda pour la jeunesse de Brazzaville.
De la ville étrangère à la ville étrange il n’y a souvent qu’un pas, un décalage, parfois à peine perceptible, qui nous amène en retour à nous interroger sur nos habitudes et finalement sur notre identité. Car, en dépit de l’uniformisation culturelle, c’est par ses différences, ses ruptures, parfois ses mystères que la ville continue de s’imposer au visiteur venu d’ailleurs.


Claude Geiss
Directeur artistique de Chroniques Nomades