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  • Image 02 Peter Fonda©PhVermès

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Philippe Vermès

Wanted Bikers


Ils se retrouvent afin de partager leur passion commune pour leur moto, pour la route, pour la liberté : celle de rouler, tête au vent, seuls ou en groupe, par plaisir, sans nécessairement aller quelque part. Chaque année, les bikers se rassemblent par dizaines de milliers à Loudon dans le New Hampshire ou à Sturgis dans le Dakota du Sud dans une atmosphère de fête en plein air. C’est là qu’à la fin des années 1980, Philippe Vermès les a photographiés : dans un studio improvisé près d’une station-service, les faisant poser devant un fond noir, éclairés par une boîte à lumière et un flash. « Wanted: Bikers », avait-il écrit au bord de la route. Et ils sont venus nombreux se faire tirer le portrait, avec leur moto, bien sûr, qui semble faire corps avec eux, parfois en famille ; des femmes aussi, tout aussi fières d’affirmer leur domination sur la machine qu’elles chevauchent.
Devant son objectif, c’est l’esprit d’Easy Rider qui s’incarne – la présence de Peter Fonda en atteste – et au-delà, celui des mythes fondateurs de la conquête de l’Ouest. Derrière cette galerie de centaures mécanisés, aux tenues vestimentaires viriles (cuir, jean, boucles d’oreilles, tatouages), Philippe Vermès a su mettre en lumière des hommes d’origines sociales et d’âges fort divers, modestes et souvent malicieux car, ne nous y trompons pas, ils assument pleinement l’emphase et la drôlerie de l’image qu’ils donnent souvent d’eux-mêmes. Ces adorateurs de belle mécanique, de chromes étincelants, d’accessoires authentiques se révèlent sensibles, respectueux et par-dessus tout solidaires, bien loin des outlaws, ces loubards de la route qui font parfois l’actualité.
Dans son œuvre de portraitiste, Philippe Vermès adopte volontiers la sobriété du noir et blanc, la précision du détail, la rigueur de composition, la contre-plongée qui magnifie et que permet le travail à la chambre. Ces partis pris trouvent ici une résonnance particulière avec le monde des bikers où le hiératisme des attitudes, la conformité des tenues strictement codifiées, le souci constant d’exhiber des machines impeccables participent d’une esthétique de la perfection glacée. Mais le vrai plaisir du spectateur – qui n’est pas que formel ¬– vient de ce que cette esthétique se trouve contrebalancée par la profonde humanité de ces motards et l’évidente complicité de l’auteur à leur égard.
Jean-Christian Fleury