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  • © Thi - Nhan Nguyen 

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Thi - Nhan Nguyen 

Je me suis remplie d’eau de pluie

A l’âge de quinze ans, Thi - Nhan Nguyen a été victime d’une maladie virale de la rétine. On a craint qu’elle ne perde complètement la vue, elle a appris le braille. Elle conservera finalement une vision très floue. Mais, très jeune, elle veut être photographe. A vingt-cinq ans, elle suit un stage de photographie et apprend à composer avec son handicap où elle vivait enfant, lui fait prendre conscience de la fragilité de la vie et de son composer avec son handicap. En 2001, la catastrophe d’AZF à Toulouse, quartier où elle vivait enfant lui fait prendre conscience de la fragilité de la vie et de son univers familial qui peut univers familial qui peut disparaitre en un instant. Elle décide alors de photographier ses parents et les traces de son enfance avant qu’elles ne s’effacent.

Que voyait-elle, étant enfant, lorsqu’elle fermait les yeux ? Ou lorsqu’elle les ouvrait alors qu’elle avait presque perdu la vue ? Que voyait-elle lorsqu’elle laissait errer ses pensées et son regard sur les reflets de l’eau de pluie au fond du jardin ? Thi - Nahn Nguyen est partie à la recherche de ces reflets-souvenirs, de ses émotions enfouies en même temps que du monde de ses parents. De leur passé au Vietnam, le Vietnam d’avant les guerres, il était quelques fois question. Mais ils en parlaient rarement à cette petite fille née à Toulouse. Alors elle a voulu aller à la rencontre de leur histoire. Elle est partie à plusieurs reprises, rendre visite à cette famille inconnue, près de Hanoï. Et elle y a trouvé un monde qui lui était parfaitement familier, aussi proche que celui de ses parents à Toulouse où ils tenaient un restaurant qui était un peu du Vietnam offert aux passants et aux clients. Là-bas ou ici, elle nous plonge dans un même univers mental, indifférent à l’éloignement géographique, fait de visions fugitives d’intérieurs, coins de jardins, de gestes quotidiens, d’objets familiers, de vieilles photographies des êtres chers. Des impressions évanescentes aux couleurs tendres et chaudes, chargées de mémoire et d’affects. Thi - Nahn Nguyen compose ses images par masses de couleurs, ainsi que sa vue défaillante lui permet d’appréhender la réalité. Le plus souvent, deux plans y sont juxtaposés, l’un proche et l’autre éloigné qui composent comme un diptyque où l’humain et les choses dialoguent harmonieusement. Au fond du restaurant de ses parents, se trouvait une porte avec l’inscription « Privé ». Thi - Nahn Nguyen l’entrouvre pour nous et nous laisse entrevoir ce qui, rétrospective ment, pourrait bien être le bonheur.

Jean-Christian Fleury